ENTREVUE EN COMPAGNIE D'UN POLICIER

Voici l'entrevue réalisée avec un agent du service de police de la ville de Montréal (SPVM).
L'Agent a été très coopératif et a accepté facilement de passer l'entrevue, mais de façon anonyme. Il ne prétend pas représenter tous les policiers et a répondu aux questions selon son expérience. Cela s'est passé au Centre Sainte-Croix.

Web Reporter : Quels sont les critères physiques et psychologiques nécessaires pour devenir policier ?

Policier : En premier, on a des tests physiques à passer. Une fois qu'on a fini l'école de police, on passe un test psychologique comportant plusieurs questions. Et ils décident si ton comportement, ton physique et ton caractère correspondent à ce qu'ils cherchent. À la base, je dirais qu’au niveau psychologique, faut être ouvert et s'attendre à absolument n'importe quoi. 

WR : Et comment se passe les cours sur ces deux plans ?

P : Le cours au niveau physique se passe durant 14 semaines. On a des épreuves à passer (un parcours avec des obstacles ou des choses à sauter). Des épreuves physiques, mais rien qui n’a pas de bon sens. C’est des choses que n'importe qui ayant déjà été en forme peut faire. Ce n'est ni dur, ni facile, mais il faut juste être motivé pour le faire.

Au niveau psychologique, c'est un autre concept en fait. Ils te mettent dans le bain (…) t'es pas chez toi, faut que tu couches ici, faut pas que tu sois en retard, faut que t'ailles à ces cours-là; ils te forgent un peu le caractère avec ça, dans le sens que t’as pas le choix d'être comme ils veulent que tu sois.

WR : D’après votre expérience policière dans le service du SPVM, avez-vous déjà été témoin d’une situation d’abus de pouvoir ou de profilage racial ?

P : Moi, personnellement, non. C’est sûr que ça existe du profilage racial et de l'abus de pouvoir, mais personnellement je n’en ai pas vu.

WR : Si cela arrivait, que feriez-vous ?

P : Là, je parle encore de ma façon de travailler. À la base, je sais comment mon coéquipier marche et il sait comment je marche. S’il y a quelque chose qui me déplaît avec, je lui parle, histoire de savoir pourquoi il a agit de même. Puis, il me donnera sa version.

WR : En tant que policier du SPVM, que pensez-vous du profilage racial et de la discrimination dont plusieurs citoyens se disent victimes ?

P : La discrimination est souvent mal interprétée. Le policier a une échelle d’emploi de la force. En premier, on commence à parler. Si le policier n'a pas le choix d'arrêter le suspect qui ne veut pas s'identifier, le policier peut prendre le contact physique pour faire l'arrestation parce qu'il y a eu infraction ; celle de ne pas vouloir s'identifier.
Ou si le policier se sent menacé, il peut passer aux armes intermédiaires. Mais ce n’est pas parce que la personne est arabe, noire, ou italienne, etc. mais plutôt qu’il correspond a un suspect. 

Pour le profilage, je dirais que le policier fait plus du profilage criminel que racial. Par exemple : St- Léonard. On sait que le coin est italien. Si on a affaire une personne recherchée dans tel type de voiture, habillé comme cela, si le policier intercepte ou arrête une personne correspondant à la description du recherché, ce n’est pas parce que le monsieur est italien ou quoi que ce soit, mais plutôt parce qu'il correspond au suspect.

WR : De quelle manière est utilisé le budget antigang qui vise à aider les jeunes à se faire une place dans la société?

P : Avec le budget venu de fédéral, je ne sais pas trop le montant et je ne peux pas non plus m'avancer sur des chiffres, mais il a servi pour former le nouveau groupe ‘Eclipse’ (groupe d’intervention contre les gangs de rue).

WR : Trouvez-vous que les activités de prévention faites auprès des jeunes par les policiers sont pertinentes ?

P : Là dessus je ne pourrais pas vraiment m'avancer à une réponse, mais les postes de police sociocommunautaire travaillent beaucoup dans les écoles, pour montrer aux jeunes comment est la police, comment ça marche. 

WR : Ne serait-il pas mieux que ces activités soient faites par d’autres intermédiaires (ayant une influence positive directe auprès de jeunes) plutôt que par des policiers ? (par ex: un basketteur, un joueur de la LNH, etc.

P : Je dirais oui, mais pas juste par des intermédiaires ou autres organisations. Parce que c’est nous autres qui sont mis sur le terrain quand il s’agit d'intervenir. Il ne faut pas qu’ils voient seulement le côté répressif, mais aussi le côté préventionniste des policiers.

WR : Croyez-vous qu'il serait bénéfique que le corps policier remette en question sa manière d’aborder les jeunes ?

P : Vu les événements qui sont arrivés à Montréal-Nord, je pense que tout est en train d’être revu. Comme je le disais, tout est dans la manière du policier d’agir, de travailler, d’aborder les personnes.

WR : Quels sont les motifs courants et les procédures d'intervention auprès des jeunes?

P : Le plus courant est un appel au 911 et la plainte concerne des bruits, parce que dans un parc il y a des jeunes en train de boire de la bière. À la base, à notre arrivée, on procède aux identifications, histoire de voir s’il n’y a pas une personne en fugue, de disparue, ou de recherchée. S’ils sont coopératifs, ils pourraient recevoir une amende ou non, cela dépend du pouvoir discrétionnaire du policier. Admettons que les jeunes crient des bêtises, c’est sûr que les policiers ne pourront pas faire d’exceptions. C’est du donnant-donnant en bref.